Wednesday, June 22, 2011

Épilogue: La réalité

La réalité de tout voyage est qu'il doit inévitablement tirer à sa fin. Plus vite on l’accepte et plus facilement il est possible de passer à autre chose et de souvent se trouver une autre aventure. Au fil d'arrivé, il nous reste des tonnes de photos, des souvenirs, des cartes, des récits (bonnes ou mauvaises expériences) et c'est à chacun d'entre-nous de décider ce qu'on en retirera. Certains personnes décident de se poser et de considérer leur expérience de voyage comme des vacances ou une belle folie de jeunesse avant de commencer leur vie. D'autres préfèrent plutôt reprendre tout de suite la route pour ne pas perdre de temps dans leur exploration des confins reculés de la planète et peut-être aussi de peur de figer au même endroit et de ne plus avoir le ''luxe'' de repartir. Personnellement, depuis mon retour, je me trouve à la croisée des chemins. D'un côté, il serait tellement facile de choisir une autre destination, de refaire ma valise et de partir au mois de septembre, mais d'un autre côté (et c'est ce qui semble me demander encore plus de courage) je pourrais aussi me faire un chez-moi, au départ pour quelques mois, quitte à voir ce qui peut ensuite arriver... Je ressens ce besoin d'être près de ma famille et de ne pas être l'étrangère, qui reviens tous les six mois et qui regarde ''notre'' vie familiale de l'extérieur. 
Je décide donc de terminer mon blogue en partageant avec vous mon retour à la réalité et les expériences personnelles qui y sont rattachés. Pour les voyageurs, j'espère que vous pourrai vous retrouver dans mon histoire et peut-être adouçir un peu la coupure qui se produira à la fin de votre propre voyage. Pensez à moi et ditez-vous que ''vous n'êtes jamais seul dans le bateau!''. Et pour ceux qui trouvent, comme moi d'ailleurs, ''qu'Andréanne n'est plus très drôle ces temps-ci'', je vous réfère à la page 1: Et le commencement dans tout ça, pendant que j'écris finalement la conclusion de ce récit qui aura été pour moi beaucoup plus que Mon année en Chine.      
Je ne vous mentirai pas, ma première semaine à la maison a été extrêmement difficile. Je me suis retrouvée à plusieurs reprises plantée au beau milieu d'une pièce à ne pas trop savoir quoi faire de ma peau, me sentant plutôt en visite que vraiment à la maison. Je ne voulais pas ranger mes vêtements utilisés en Chine avec les autres déjà dans mes tiroirs (les vêtements d'avant) et trouvait que ma chambre semblait déjà complète, sans moi. J'ai pleuré à plusieurs reprises et dans n'importe quelle situation, quand une vague de réalité est venu me réveiller et me planter les deux pieds bien fermement au sol, à Gatineau, Québec. J'ai revu quelques amis sans trop savoir quoi leur dire sur mon expérience, ''Euh la Chine? C'était génial... et toi quoi de neuf?''. Je me suis retenue de toujours dire ''...et en Chine c'était comme ça'' pour ne pas provoquer une surdose chez mes parents déjà tellement patients. Je me suis assise silencieusement à table avec ma famille, ne sachant pas trop comment entrer dans la conversation de maison-boulot. J'ai eu une attaque de panique dans le département des femmes du magasin Simons, quand j'ai du choisir entre des shorts bruns foncés, bruns pâles, sable, 3/4, courts, longs... J'ai tenté sans succès d'écrire les dernières entrées de mon blogue ne voulant pas inconsciemment mettre le point final à mon récit... Bref, j'ai fait passer les journées du mieux que je le pouvais en tentant d'être engagée avec ma famille, tout en vivant mon deuil. 
1. Le Choc
Lundi: Andréanne se souvient qu'elle peut boire l'eau du robinet et se remplit un verre avec le sourire. Elle discute ensuite avec sa mère de la Chine et marche dans l'herbe du jardin, pieds nus. Andréanne mange avec appétît son bol de céréales et jette le papier de toilette... dans la toilette. Elle écoute les oiseaux et ne tousse plus. Comme c'est bon d'être au Canada. 
2. Le Déni
Toujours lundi: Malgré tout les petits plaisirs de la vie quotidienne à Gatineau, Andréanne semble croire qu'elle retourne à Shangqiu la semaine suivante. Elle écrit à ses amis tous les jours et attend avec impatience les appels sur Skype. Ses valises sont toujours pleines.
3. La colère et le marchandage
Mardi: Les deux genoux dans les valises, Andréanne se fâche contre sa maudite pile de vêtements qui ne fait que grossir et grossir. Elle cherche comme faire entrer le contenu de ses valises dans ses tiroirs sans succès. Elle devra se départir de certains items, mais n'en trouve pas la force. Elle laisse tout en désorde et retourne à l'ordinateur. Elle tappe: Esl job Japan.
4.  La tristesse
Mercredi: Maman est au travail alors Andréanne se couche près de ses valises et laisse finalement les larmes couler. Et elle pleure... et pleure... et pleure, ne sachant pas trop à quoi se raccrocher pour reprendre contrôle sur ses émotions. Elle vit finalement toutes les séparations de la semaine précédante. Au courant de la semaine, elle sent que sa famille ne sait pas trop comment s'approcher d'elle, ne voulant pas la rendre encore plus triste en parlant de son voyage. Elle se sent seule.
5. La résignation
Vendredi: Maintenant en visite à Québec, Andréanne commence à se faire à l'idée qu'elle pourrait bien s'y installer et prendre le boulot stable qui lui est offert. Elle comprend que si elle décide de repartir pour un autre voyage, une telle occasion ne se représentera peut-être plus. Elle a toujours envie de repartir, mais elle commence à apprécier l'idée d'être en terrain connu. Elle se sent en sécurité d'être si près de sa soeur. De sa vie bien en marche.  
6. L'acceptation
Présentement: Andréanne est aux États-Unis pour l'été, à Middlebury, où elle travaille à l'École française comme elle le fait depuis 4 ans. Elle se sent bien - Home. Elle raconte avec enthousiasme son voyage, se rappelant de chacun des détails, mais le sentant de plus en plus loin. Le future à l'horizon semble plus près, complètement indécis et plein de possibilités. Elle pourra en faire ce qu'elle voudra.
C'est donc sur cette note positive que je termine cette histoire. Rassurez-vous, Andréanne va très bien. J'ai n'ai pas terminé de travailler sur mon blogue, car mon prochain projet est d'en faire un récit de voyage. J'espère aussi franchement pouvoir écrire d'autres blogues de Mon année... quelque part.

Au courant de cette année, j'ai beaucoup ri, parfois pleuré, j'ai fait des rencontres, j'ai mis le pied où je ne croyais jamais le poser, mais j'ai surtout appris qu'avec un dictionnaire, un grand sourire et beaucoup (BEAUCOUP) de patience... on peut se rendre jusqu'en Chine et en revenir en un seul morceau!!  

À bientôt j'espère...

Andréanne

Saturday, June 18, 2011

Bienvenue au Canada

La porte de l’avion s’ouvre laissant passer les passagers excités. Assommée par la fatigue, je m’empare de ma petite valise et suit la foule jusqu’au terminal. Cette fois-ci je n’espère pas qu’il y ait des clowns, des ballons ou un orchestre, mais bien que comme par magie, la passerelle se termine et que je sois de retour à Shanghai. Malgré les panneaux en anglais et en français qui m’entourent, mon cerveau a de la difficulté à accepter qu’il est bel et bien au Canada. Ma vie que j’y aie laissée il y a quelques mois semble tellement lointaine et mes souvenirs chinois si frais que mon cœur ne m’a visiblement pas suivi de ce côté de l’Océan Pacifique. En marchant je me questionne. Est-ce que Shannon et Brett sont arrivées à Shangqiu? Adam a-t-il réussi à avoir son billet pour le train de nuit? J’espère que Naïk a aimé son spectacle d’acrobaties.  Habituée à pouvoir envoyer des messages textes à mes amis pour un oui et pour un non, mon isolement se manifeste gravement lorsque je me retrouve coupée de mon moyen de communication.
Le terminal de l’aéroport d’Ottawa est complètement vide et comme pour me permettre de reprendre ma contenance avant les retrouvailles, notre avion est arrivé à la porte la plus loin de la bâtisse. En marchant, je me force à revenir au moment présent. Dans seulement quelques secondes, je me retrouverai devant mes parents et je ne serai plus ''Andréanne exploratrice téméraire'', mais bien ''Andréanne, bébé de la famille''. J’aperçois au loin l’escalateur qui mène aux bagages. Plus que quelques pas. Dès que je mets le pied sur la marche du haut, je vois ma mère près du mur qui m’attends excitée, une lanterne chinoise bleue à la main et flanquée de mes deux voisins (depuis longtemps considérés comme la famille) brandissant des signes fait à la main spécialement pour mon retour. Je cherche mon père du regard et me souvenant soudainement qu’il a coupé sa moustache (sur sa lèvre supérieure depuis 1970) le trouve finalement plus près des marches prenant des photos. Quelques secondes plus tard, on m’étreint de tous les côtés. Je me sens comme une triathlète du voyage au fil d’arrivée, après un marathon asiatique particulièrement difficile. Comme c’est bon (et étrange) d’être chez soi. Tout le monde parle en même temps alors qu’on tire mes énormes valises du chariot. Je tourne sur place à plusieurs reprises, tentant d’absorber le plus possible mon environnement et de finalement vivre plutôt que de rêver mon arrivée au Canada.
Le trajet dans la voiture est étrange. Les véhicules autour de nous roulent tellement vite (il n’y a pas de traffic ici!) et j’ai une peur incontrôlable qu’un passant ou une voiture se jette devant notre chemin sans regarder comme ils le font si souvent en Chine. Lorsque la voiture arrive finalement à destination je découvre que ma maison est bel et bien au même endroit et que rien n’a changé… sauf moi. Je suis ma famille à l’intérieur et nous discutons jusqu’aux petites heures du matin de mon départ de Shangqiu.
Les émotions se bousculent avec frénésie : La joie d’être finalement avec mes parents, la fatigue du long voyage, la frustration de ne pas pouvoir tout leur expliquer et leur montrer, la mélancolie des aurevoir si frais, mais surtout la peur de rejoindre mon lit et de ne pas m’endormir en Chine pour la première fois. Cette constatation me pèse sur les épaules comme une finalité sans équivoque. Bientôt, je devrai dire qu’''hier j’étais en Chine'', ''la semaine dernière…'',  ''le mois dernier…''. Je ne veux pas tout de suite mettre dans le passé MA Chine et j’ai peur d’oublier trop vite. Oublier le poulet Kung-Pao fumant du restaurant Chongking. Oublier l’odeur de mon appartement et de la brise chaude qui entrait par la fenêtre. Oublier les sons du matin (aussi dérangeant soient-ils) alors que le campus se réveille. Oublier les couchers de soleil qui se reflétaient dans le lac. Oublier mon mandarin et les conversations avec les chauffeurs de taxis. Oublier l’excitation de mes étudiants lorsque j’entrais dans la salle de classe. Oublier le regard amoureux d’Adam me trouvant tout le temps dans n’importe quelle foule. Oublier ma complicité avec Shannon et sa manière de me rappeler que ''You ARE home''. Oublier les ''Hello Andy'' lancés à tous vents par les étudiants. Oublier que n’importe quoi se mange avec des baguettes. Mais surtout j’ai peur d’oublier qu’il y a un an, je ne savais absolument rien de ce qui m’attendait et je suis sortie de l’avion à Pékin en espérant voir un clown, des ballons…

Boucler la boucle

Mes dernières journées à Shangqiu resteront toujours dans mes souvenirs comme un marathon flou, les journées s’enchaînant à une vitesse folle et se métamorphosant en un seul grand ''moment'' sans répit. Mon horaire chargé me permettant difficilement de souffler entre les repas d’adieux, les rencontres avec mes étudiants, l’aspect logistique d’un déménagement transpacifique et la volonté de passer un moment de qualité avec chacun de mes amis. Personnellement, face à autant de changement et de pression, je n’avais envie que de me rouler en boule dans mon appartement pour faire passer les heures jusqu’à mon départ et de quitter la ville en douce, au beau milieu de la nuit, me sauvant ainsi les adieux qui brisent le cœur.

Vendredi
6h45:  Mon réveil matin me fait sursauter. ‘’Schrrrrrrrrrrrrrrrtttt- ptiou’’ : la femme de l’appartement en face se racle la gorge et projette le tout dans un crachat Olympique... Chapeau, mes fenêtres doivent être toutes beurrés! (Mémo personnel : Demander à mes parents de venir se gargariser dans mes oreilles chaque matin pour ne pas que je m’ennuie trop!). Je me tire du lit dans un mouvement énergique et percute de plein fouet la maudite porte battante de ma garde-robe vide… repli stratégique dans le lit pour lécher mes blessures. Un Adam encore endormi, tel la tortue de La Fontaine, sort de la chambre en premier, gagnant ainsi le concours non-officiel.  Commentcommencerlajournéedubonpied.com ...
8h:  J'arrive en classe armée de mon ordinateur et projette pour mes étudiants un petit vidéo que j'ai préparé afin de leur montrer les différents endroits que j'ai visité pendant mon année en Chine... Bon. Personnellement, je croyais que mes étudiants, qui ne donnent même pas de caresses à leur parents, allaient rester de glace face à mon départ, du style serrage de main et un petit ''Zaijian'' gêné, mais comme j'avais tord! À la fin de mon vidéo qui pouvait tout de même, je l'avoue, rendre l'oeil humide, la classe entière a été plongée dans un silence lourd entrecoupée de petit sanglots discrets. MERDEEEEE. Moi qui les imaginais tous me posant des tonnes de questions sur les villes chinoises et rigolant de mes mésaventures le sourire fendu jusqu'aux oreilles, the plan had backfired!! J'ai donc tenté d'alléger un peu la tension en chantant une chanson et heureusement c'est avec le sourire qu'ils ont finalement quitté la classe.

 10h10:  J'entre dans le bureau de Mr.Yu pour lui apporter un petit cadeau de départ. Parce qu'il veut probablement faire son difficile, c'est le seul homme chinois de toute la terre qui ne fume et ne boit pas alors j'ai décidé de lui acheter une grosse boîte de biscuits étrangers... Connaissant les chinois, ils vont probablement terminer dans le bol du chien, mais c'est l'intention qui compte. Mon patron me fait donc signe de m'asseoir et j'accepte poliement, me disant quand même que j'ai d'autres coquerelles à fouetter lors de ma dernière journée à Shangqiu! Après un court échange où je n'arrive pas à me sortir de la tête que ce gars (THIS GUY!) est un prof d'anglais! Oui, oui... CE GARS LÀ. 
Mr Yu: ''So, your suitcase, it ok?''
Andréanne: ''Yes thank you, it's not a problem''
Mr Yu: ''How.. you leave... where?''
Andréanne: ''I'm leaving from Shanghai on Sunday night.''
Mr.Yu: ''You ok to go. You show me your house before you go. Ok?''
...
Et cette conversation de Sesame Street continue comme ça pendant 15 minutes... Je quitte le bureau autant amusée qu'inquiète pour l'avenir des étudiants chinois...
11h30: Dernier repas à mon restaurant préféré. Adam et moi sommes assis devant un gigantesque festin de poulet Kung-Pao et d'aubergine épicée. Je tente d'exprimer ma gratitude à la patronne pour tous ces bons repas qui m'ont assurément empêchée d'attraper le scorbut, mais alors que j'aimerais dire: ''Madame votre nourriture est divine et je vais m'en ennuyer longtemps après mon retour au Canada.'' je dis probablement plutôt ''Nourriture..bon''. Je lui remets tout de même une épinglette du Canada en souvenir de moi, qu'elle regarde avec curiosité, n'en ayant visiblement jamais vu avant. 
12h00:  Dans mon avidité pour les petits plaisirs de la vie, je tente de ''djammer'' un dernier massage dans mon horaire serré, mais comble du malheur, tous les thérapeutes sont occupés. Semblerait-il que deux clients ont demandé le spécial-extra-long-de-massage-qui-ne-finit-plus et ils sont parti pour être allongés pour la prochaine heure et demi... Cailloux #2 dans le soulier, le masseur qui termine son boulot est ''le gars qui fait mal'' alors, malgré le fait qu'il me réclame (''Ok. Andy''), je pousse gentiment Adam (hum...hum...) à ma place. C'est toujours drôle de voir le visage du masseur qui croit m'avoir sur sa table et découvre plutôt un mec! Finalement, le meilleur masseur revient de son heure de dîner et je peux finalement relaxer. Avant de partir, la patronne demande de prendre une photo avec moi, j'imagine pour se souvenir de la cliente qui a grandement contribuée au financement de sa nouvelle cuisine! 

13h44: J'ai rendez-vous avez Mr.Yu à mon appartement dans 1 minute et je suis de l'autre côté de la ville. L'horloge du salon de massage était en retard et la gentille dame qui conduit le taxi semble vouloir nous donner l'expérience ''spécial touriste'' de Shangqiu. Madame, ça fait 9 mois que j'habite ici alors vos crottes de chien (ou de Chine, dépendant), je les ai déjà vues!!  Adam cool as a cucumber tente de me changer les idées.

14h: Nous arrivons finalement à mon appartement où Shannon, Brett, Mr. Yu et un taxi nous attendent tous pour le départ. De dire: ''Scusez je me faisais masser'' ne semble pas une excuse très sérieuse alors je ne fais que dire ''Scusez''... Mr. Yu monte avec moi pour être témoin que je n'ai pas mis mon ameublement en chêne massif dans ma valise (...) et nous empoignons mes valises en vitesse pour rejoindre le taxi. Dans l'affolement du départ, j'oublie que je quitte pour de bon ma petite maison chinoise, mais au dernier moment, je prends tout de même un instant à la porte pour y jeter un dernier coup d'oeil. Que de bons moments...

14h02: Nous sommes empillés dans le taxi: Shannon, Adam, moi et mon Er-hu sur le siège arrière et Brett à l'avant avec ma petite valise. Le coffre ne ferme pas sur mes valises surdimensionnés et je suveille le tout avec inquiétude par la lunette arrière. Nous laissons un Mr.Yu moitié soulagé (il ne doit pas me reconduire à Shanghai) - moitié triste (un autre prof à remplacer) devant mon appartement. Le taxi quitte l'école.

15h: Mes amis trimbalent leurs (mes) valises attitrés (j'en ai quand même 4...) le long de la plate-forme où arrivera le train. Les habitants de Shangqiu nous regardent avec curiosité, nous prenant visiblement pour des touristes. Avec mon Er-hu en bandouillière, nous avons l'air d'un groupe folklorique en tournée... Le train rapide arrive finalement et nous prenons place dans le compartiment pour un voyage de 6h jusqu'à Shanghai. 

21h: Shanghai est aussi resplendissante que lors de ma dernière visite. Je me félicite d'avoir pris mon billet de départ de cette ville. Je paie la traite à mes porteurs dans un Mc Do et nous nous couchons épuisés.

Samedi

Notre journée à Shanghai est consacrée à tenter de faire entrer le plus de souvenirs possibles dans ma valise à moitié-vide. Nous visitons le marché de contre-façon que j'ai déjà exploré avec Ciaran et 2h plus tard ressortons (en tout cas, moi) les mains chargés de paquets. Après un courte sieste, nous mangeons dans un superbe restaurant de sushi (devinez qui a décidé de l'endroit du repas...) puis nous allons au Bund pour prendre des photos cocasses en groupe. En après-midi, Shannon nous a tous acheté le même t-shirt avec des Pandas qui font du Kung-fu alors nous avons l'air d'un sympatique groupe de touristes canadiens (la majorité l'emporte!). Nous terminons la soirée dans une ''pub'' local où nous (Brett, Adam, moi) prenons une bonne cuite! 
Dimanche

Le moment tant redouté est finalement là: Ma dernière journée en Chine. Mon avion ne décolle qu'à 17h alors Adam me guide de nouveau vers le Bund pour une matinée en amoureux. Nous prenons place sur un banc et observons silencieusement les passants, la brume engouffrant les gratte-ciels de Pudong. Alors que nous profitons de notre dernier moment d'intimité, des touristes chinois viennent s'asseoir juste assez proche de nous pour que nous soyons dans leur photos, mais juste assez loin pour qu'ils n'aient pas besoin d'engager la conversation. À un certain moment, une femme me tend son enfant en souriant alors je cherche le courage de prendre la pose malgré les vagues d'émotions qui se font de plus en plus fortes. Nous nous foutons de la foule dans notre bulle: Adam pensant à son retour à Shangqiu sans moi et moi au chemin difficile qu'il me reste à faire... sans Adam. Il a tellement été présent dans chacunes des étapes de mon départ que j'ai oublié comment transporter tout le poids de ma grande aventure sur mes propres épaules.   

Le moment arrive finalement de quitter Shannon, Brett et Naïk à la station de métro. Étrangement, alors que je dis aurevoir à ma famille chinoise, ce n'est pas un sentiment de fatalité ou de déchirement qui me prend, mais plutôt un ''See you later'' comme si je revenais la semaine suivante. Shannon me serre rapidement dans ses bras, comprenant que nous devons faire vite pour que je puisse toujours garder un contrôle sur mes émotions. Elle me dit ''see you soon, we love you man'' alors qu'elle me tourne le dos pour entrer dans le métro. 

Après m'être débarassée de mes trois valises au comptoir d'Air Canada, je reconduis Adam au métro où nous sommes forcés de partager un moment très intime avec tous les autres voyageurs de l'aéroport de Shanghai. Il garde le sourire et me fixe intensément jusqu'à ce qu'il disparaisse au bout du corridor. 

Et voilà, comme lors de mon arrivée à Pékin il y a plusieurs mois, je suis de nouveau seule face à une autre aventure. Celle-ci beaucoup plus compliquée. Je sais que le retour à la maison sera rempli de bonheur, de défi et de difficulté, mais à ce moment, je ne peux que regarder par le hublot où ma Chine s'éloigne peu à peu...  

Monday, June 13, 2011

Yiiii Kuai... Yiiii Kuai

Qui dit déménagement dit aussi habituellement vente débarras... et dieu seul sait que pour une voyageuse magasineuse, la Chine est une terrain de jeu beaucoup trop propice à la pratique de ce sport. S'empillent alors dans mon appartement depuis plusieurs mois des achats de toutes sortes accumulés au fil des sorties en ville et des petits voyages. Vêtement d'hivers... vêtements trop petits... vêtements à jeter... vêtements laids... plantes... décorations.... sapin de Noël... articles pour la maison... Je devais donc me débarasser d'une quantitée impressionnante d'items avant de réellement commencer à faire mes valises pour le Canada. Shannon m'a raconté avec horreur que les deux derniers locataires de mon appartement (aussi profs étrangers) ont laissé le logis dans un état épouvantable et qu'elle a dû se tapper le ménage avec Brett afin de sauver notre réputation face aux nettoyeurs chinois.  En Chine, la réputation est presque entièrement déterminée par les apparences et ça ne prends qu'un seul imbécile pour donner l'impression à une population au complet que nous sommes des cochons irrespectueux. J'avais donc décidé depuis longtemps que mon appartement serait des plus propres à mon départ et que ma réputation ne serait jamais ternie par un appartement en désordre. Malheureusement, je ne savais pas que cette décision ne serait pas entre mes mains...

J'ai donc fait un début de grand ménage et bien rapidement mon appartement a commencé à ressembler à une ville dévastée par une bombe A (comme dans Andréanne qui nettoie...). Partout dans la maison, il fallait éviter les piles de vêtements à donner, sauter par dessus les valises à moitié entamés, contourner les cadeaux des étudiants et ramper sous la pile de boîtes vides et de recyclage. Je peux vous dire que ça faisait dûr. J'ai aussi arrêté d'inviter de la ''visite'' afin de limiter les jugements face à mon bardas! Vendredi est finalement arrivé et j'ai réservé mon après-midi pour faire le grand nettoyage. Dès mon retour de l'école, je cours donc au petit coin et lorsque j'en ressort, j'entends quelqu'un qui joue avec ma poignée de porte! Je me dirige donc en vitesse vers l'entrée, les pantalons encore ouverts parce que je suis pressée de voir qui tente de me cambrioler (!!), et découvre par le ''peephole'' que mon patron, Mr.Yu, est planté devant ma porte en compagnie de 3 autres chinois. Que je le veuille ou non, la clé est dans la porte et il va entrer dans mon appartement dans les prochaines secondes. Je décide qu'il vaut mieux tenter l'offensive (le repli stratégique est impossible... il a ma clé!) et ouvre la porte d'un mouvement brusque. Je me retrouve donc devant mon patron, son assistant et un couple de chinois qui ont tous la tête de gens qui se sont fait prendre les culottes baissés... alors que c'est plutôt mon cas!

Mr. Yu me regarde catastrophé: ''Oh... I was trying to call you!''. Premièrement: Mon oeil... et deuxièmement: Quand? Avant ou après que la clé soit dans la serrure? Bref, je suis tout échevellée, à moitiée dans le processus de me changer pour faire mon ménage et je fais de mon mieux pour cacher mon appartement de la vue des visiteurs (sans oublier mes culottes ouvertes!). Il m'explique rapidement que le couple est venu visiter mon appartement et ''Would it be possible to come in?!''. Malheureusement pour moi, un de mes gros problèmes est que j'arrive difficilement à dire non (surtout à mon gentil patron) alors j'invite avec réticence le jeune couple à entrer dans ma tanière. Pendant qu'ils osent à peine regarder dans chacune des pièces, je fusille du regarde mon patron et lui fait comprendre que ''Peut-être que ce n'est pas bien de débarquer chez les gens comme ça et qu'il faudrait les avertir au moins 10 minutes en avance pour qu'ils ne viennent pas juste de sortir des toilettes?''. Il regarde ses souliers. Finalement, l'homme du couple s'adresse à moi et me demande si l'appartement est bien chauffé. Et moi de lui répondre: ''En fait, vous n'aurez sûrement aucun problème! Tout a été remplacé cette année parce que c'était brisé!'' (poum, poum, poum, tschiiiiiiiiiiiii). Ils me remercient mille fois de mon hospitalité et quittent mon appartement aussi rapidement qu'ils sont arrivés.

Alors voilà pour ma réputation, mais il me restait toujours à me débarasser de tous ces ''trésors''... Heureusement pour moi, chaque année au mois de Juin, les étudiants nouvellement gradués organisent une vente trottoir dans quelques rues de l'Université afin de vendre ce qui ne leur sera plus nécessaire et faire quelques heureux parmis les étudiants. Les habitants de la ville, toujours à la recherche d'aubaines, prennent aussi part aux festivités et un grand évènement en découle. Assisté par quelques amis étudiants, j'ai donc rempli une grosse valise et nous nous sommes installés un petit tapis au centre du marché. Au moment où nous avons rejoint notre emplacement, avant même que je n'aie le temps d'ouvrir ma valise, une véritable foule s'est amassée autour de nous. Des habitants de la ville, des travailleurs de l'école, quelques étudiants... tout le monde voulait jeter un coup d'oeil aux choux gras de la ''laowai''. Mes amis ont déballé mes articles précieusement, s'assurant d'en mettre plein la vue aux passants attentifs et la négociation a commencée. Mes vêtements se sont passés entre toutes les mains, mes couvertures lancés à gauche et à droite. Tout a été manipulé, tâté et scruté pendant que mes amis dictaient des prix ridicules pour mes articles. Pendant ce temps, impressionnée par le mouvement de foule, j'observais le cirque de loin laissant à mes étudiants le soin de récupérer l'argent des acheteurs satisfaits. C'est tout de même avec un pincement au coeur que je me suis départie de mes articles, chacun me rappelant un bon moment de mon année en Chine. La grosse ''doudou'' en polar qui m'a gardée au chaud tout l'hiver, mes mitaines Canada, mon lecteur DVD, mon dictionnaire anglais-mandarin... Mais le plus irritant dans tout ça, c'est que pour bien négocier, les chinois se sentent obligé de dénigrer ce qu'ils achètent pour en faire baisser le prix. J'ai donc entendu que mes vêtements étaient: laids, grands, sales, de mauvaise qualité, usagés, bon pour la poubelle, etc... Par chance que je ne comprenais pas tout!  Rapidement la pile s'est mise à baisser et j'ai accumulée de plus en plus d'argent. Quelques étudiants tenaient absolument à acheter de mes vêtements pour conserver un souvenir de moi et se tortillaient encore plus de joie lorsque je leur disais que l'objet choisi venait de Thaïlande, de Malaysie, de Singapour... ou comble de plaisir: du Canada.

Les heures se sont mises à passer rapidement et lorsqu'Adam est venu me rejoindre à 18h30 pour le souper, il ne me restait qu'une dizaine de gilets à vendre (que voulez-vous, j'en avais beaucoup!). Afin de pouvoir aller manger, il me fallait quand même épuiser mon stock alors j'ai annoncé à mes étudiants que nous faisions une vente de feu: 5 yuan l'item! Nous étions donc plantés-là à crier: ''Wu Kuaiiii, Wu Kuaiiii'' alors que personne ne semblait intéressé par mes guenilles. Adam qui avait remarqué les caractéristiques de mes acheteuses m'a suggéré de tenter d'attirer les petites vieilles: ''Yeah Andy, all the old ladies LOVE your stuff! There are the only ones who buy your clothes!''... merci Adam pour cette analyse de marché... Étonnament (...not), depuis l'arrivée d'Adam de plus en plus d'étudiantes s'arrêtaient à notre tapis pour épier mon petit-copain tout en jouant avec mes guenilles. Une téméraire rouge comme une tomate est même allée jusqu'à lui dire d'un seul souffle, ''I want you to take me back to your country!''. Hum... j'avais la possibilité de faire quelques yuan de plus!! ''UNNN étranger britannique.. UNNNN...''.

Nous avons continué à crier et quand personne ne s'est manifesté après une heure, nous sommes descendus à 3 Yuan.... puis 2 Yuan... pour finalement offrir mes items à 1 yuan! ''Yiiiii Kuai, Yiiii Kuai''. Rien à faire. Les passants ne prenaient même plus la peine de regarder sur mon tapis. C'est alors que la sagesse m'a atteint comme un projectile en plein visage: Les chinois aiment négocier et donc lorsqu'on leur offre quelque chose à très bas prix ils se méfient. Ils préfèrent négocier à mort plutôt que de s'en faire passer une petite vite et perdre 1 yuan... je n'étais donc pas plus avancée devant ma petite pile de vêtements et nos estomacs qui grondaient de plus en plus fort. Avec l'énergie du désespoir, j'ai achalée quelques passantes pour finalement jeter les armes et tout donner à ma voisine de tapis.

En conclusion, je crois que le marchandage chinois est un peu comme l'Opéra de Pékin... c'est long, c'est plate, on ne comprends rien et il faut être un peu massochiste pour l'apprécier.

< Ajoutez ici votre propre proverbe chinois sur la patience qui porte fruit >       

Wednesday, June 8, 2011

Examen médical: Ouvert au public

Le stress de départ forçant bien souvent le métabolisme à se révolter, je devais inévitablement tomber malade avant mon retour au pays de la feuille d'érable! Parce que je suis beaucoup trop ''spéciale'' pour seulement attraper une bonne grippe, j'ai eu droit au retour de ma maladie de fantaisie de prédilection: L'infection occulaire! Jusqu'à ce jour, je ne sais toujours pas ce qui irrite autant mes pauvres petits yeux, mais je peux vous dire que les symptômes sont toujours aussi violents.... et particulièrement lors de cette crise. J'avais donc simultanément un mal de tête à me fendre le crâne en deux, deux yeux rouges et irrités qui pleuraient sans arrêt, de la fièvre, le nez bouché et pour la bonne mesure: une toux de pollution qui n'avait pourtant pas été invité à ce ''party de symptômes'' mais qui avait décidé de quand même se présenter. Enfoncée jusqu'au cou dans mes valises, je ne pouvais me permettre de m'appitoyer sur mon sort pendant trop longtemps alors j'ai appelé mon patron pour qu'il m'accompagne à l'hôpital... Bom, bom, booommmmmm. (cue musique de film d'horreur)

J'ai enfilé mon cotton-ouaté avec capuche méga-camouflante, mes lunettes de Jackie O (par dessus mes lunettes de vues... un style toujours aussi sexy! Mon petit doigt me dit que ce sera la mode en 2012... à Shangqiu) et je me suis rendue à la porte de l'école pour retrouver Mr.Yu. Étrangement, il n'était pas à l'heure alors j'ai poiroté pendant quelques minutes en espèrant qu'il se-dépêche-maudit-j'ai-mal-à-l'oeil-je-vais-me-décomposer-pourquoi-moi? Arrive alors un petit monsieur pressé qui m'appelle et me fait signe de le suivre. Hum... je fais rapidement le tour des quelques visages chinois différents de ma mémoire mais je n'arrive pas à déterminer qui est cet individu. Deux choix se présentent à moi: 1) je lui demande qui il est et l'insulte probablement parce que je l'ai assurément déjà rencontré ou 2) fais comme si de rien n'était et embarque dans le taxi... La porte se referme sur mon visage contorsionné qui cherche toujours à reconnaître le type assis à l'avant. Bof, en autant qu'il m'amène à l'hôpital, c'est ce qui compte!

Après un court trajet, le taxi s'arrête devant l'hôpital où des dizaines de patients en état de décomposition avancés sont évachés sur l'herbe entourant le bâtiment. Est-ce que les familles les ont ''parkés'' là pendant qu'ils allaient à l'intérieur? Ils les ont abandonnés à leur sort? On dirait un centre d'achat un jeudi après-midi après le Bingo... Bref, nous marchons rapidement à travers la foule alors que je me fais pointer du doigt abondamment. Parce que s'il y a quelque chose de plus intrigant pour un chinois qu'un étranger.. c'est un étranger malade! D'un coup que mes microbes seraient aussi bizarre que moi! Je suis donc Mr. Ren (d'après Shannon) jusqu'au comptoir où je dois acheter une carte de débit d'hôpital qui me permettra de tout payer mes traitements d'un seul coup. Bien joué, c'est pratique! Nous prenons ensuite l'ascenseur jusqu'au 6e étage - yeux - et rejoignons les autres patients devant le comptoir de service. Au milieu des aveugles, des cataractes, des objects non-identifiés enfoncés dans les yeux, ma petit infection n'est pas trop impressionnante et je remercie le petit Jésus de ne pas avoir de baguette chinoise dans l'orbite! Le plus traumatisant dans tout ça, c'est que les patients du département ''yeux'' ont aussi plusieurs autres bobos visibles et pourraient facilement se retrouver sur les étages ''toux dégueu et crachat'', ''bobo avec du pus'' et ''membre manquant''... Je remonte mon gilet pour cacher mon visage.

Après une courte discussion avec la préposée je me dirige dans une salle de triage où une bonne dizaine de patients sont serrés autour d'un seul pupitre. Lorsque je m'approche un peu, je découvre qu'il y a deux pauvres médecins qui tentent de servir les patients dans l'ordre et repousser la foule pour qu'ils puissent travailler. Alors que Mr.Ren tente de se faufiller devant tout le monde, je recule contre un mur et observe les chinois à l'oeuvre. Plus les type sont âgés, plus ils utilisent leur cannes/marchettes/sac d'épicerie pour se faire un chemin dans la foule et les femmes n'hésitent pas à prendre appui sur mes épaules et me piler sur les pieds pour gagner quelques centimètres. Je sens alors de petits doigts cruchus s'enfoncer dans mes côtes et me retourne pour trouver une madame agressive qui tente de passer devant moi. Je l'apostrophe calmement tout en empoignant fermement son bras: ''Wait a minute please.'' Malgré mon intervention, elle me jete un regard qui tue et continue à pousser. Au même moment, Mr.Ren arrive à donner mon papier au médecin qui me demande d'aller passer un examen de la vue... Hum...Vous êtes chanceuse madame! Sauvé par le Gong!

Maintenant si vous réfléchissez un peu aux examens de la vue des pays occidentaux, vous comprendrez qu'il est impossible de faire la même chose en Asie pour cause d'inexistance de l'alphabet!! Oui, il y a toujours le Pinyin qui utilise notre alphabet, mais ce n'est que la couche la plus éduquée de la population qui peut utiliser cette écriture alors ils se doivent de trouver une solution pratique. Ils ont donc recours aux symboles. Plutôt que de devoir réciter les lettres qui sont affichés sur le mur, le patient doit indiquer la direction des rangées de flèches. En haut, en bas, gauche et droite. Lorsqu'arrive mon tour, j'aimerais beaucoup me prêter à l'exercice, mais telle la chauve-souris en plein jour (et la nuit aussi tant qu'à faire) je ne vois absolument rien sans mes lunettes. On pourrait facilement mettre devant moi Brad Pitt et Daniel Craig en boxer et je leur demanderais de se tasser parce que je n'arrive pas à voir la feuille sur le mur! L'occuliste se met à rire de mon handicap (Petite nostalgie pour l'objectivité médicale des pays occidentaux) et me demande de remettre mes lunettes pour passer le test. Je réussie haut la main et retourne dans la salle de triage toujours aussi bondé.

C'est maintenant mon tour de me faire inspecter les yeux dans la machine spéciale et le médecin me demande d'appuyer mon menton sur le support collectif en plastique qui n'a probablement jamais été lavé depuis sa sortie de l'usine. Je sors mon petit Kleenex pour protéger mon visage sous l'oeil amusé des 25 badeaux qui observent mon examen en attendent leur tour (j'aurais sérieusement besoin d'un cordon en velour rouge pour les empêcher de s'asseoir sur mes genoux) et m'installe confortablement pour me faire pointer une lampe dans mon oeil infecté. Des... heures....de....plaisir! J'attend les applaudissements de la foule lorsque le docteur termine son examen mais je me fais plutôt pousser en bas de ma chaise par une minine qui a décidé qu'elle voulait mon tabouret. Après vous madame... Malheureusement pour moi, ce n'est pas terminé et je dois me faire mettre de l'iode dans l'oeil pour mieux voir l'étendu du désastre au microcospe. J'attend donc maintenant avec le yeux tout jaunes que le docteur termine avec le gars qui a juste un oeil et re-tabouret, re-Kleenex le diagnostique est tombé: Conjonctivite. Le docteur me prescrit différentes goûtes et de la crème et Mr. Ren m'abandonne pour visiter la pharmacie.

En attendant mon traducteur, je m'appuie sur le mur à l'extérieur de la salle d'examen et enfonce ma capuche sur la tête pour me protéger des rayons du soleil. C'est alors qu'un curieux décide qu'il veut absolument jaser avec moi et il me bombarde de questions en mandarin. Voulant tout de même être polie, je réponds aux premières questions, mais voyant qu'il croit visiblement que je veux jouer à ''Question pour un Champion'', je me dois tout de suite de ralentir ses ardeurs. ''Qing, wo bing le, wo bu yao shuo - S'il vous plaît, je suis malade, je ne veux pas parler''. L'homme me regarde pendant quelques secondes et se retourne ensuite vers sa famille pour leur dire que je ne comprends rien. NON, ce n'est pas que je ne comprends rien, c'est que je ne veux PAS parler! Il continue son interrogatoire alors que je transperce l'ascenseur du regard dans l'espoir que Mr. Ren se matérialise et vienne me sauver. Pas de chance, l'homme est carrément agressif et place son visage à quelques centimètres du mien pour obtenir mon attention. À ce point, je commence à sentir un ''pêtage de coche'' imminent alors je prends mes cliques et mes claques et pars m'asseoir seule sur une banquette à l'autre bout de la salle. Je prends même soin de bien installer mon Ipod pour décourager les autres curieux. Alors que je choisis une chanson, je remarque stupéfaite que le connard m'a suivi à l'autre bout de la salle et me parle toujours! Je pête une plomb: ''I DON'T WANT TO TALK. I AM SICK. LEAVE ME ALONE!!!''. Et dans mon élan de colère, mon corps est aussitôt pris de convulsions et j'éclate en sanglot, de grosses larmes chaudes coulant sur mes joues. Heureusement pour moi, à ce point l'homme est découragé et retourne auprès de sa famille. Je tente de retenir la vague de désespoir qui m'assaillit à répétition, mais c'est plus fort que moi. Mais qu'est-ce qui peut bien motiver ce type à penser que c'est ok de m'harceler comme ça dans la salle d'attente? Pour toutes les fois où je n'ai pas voulu pleurer dans les dernières semaines, c'est cette goûte d'eau qui fait déborder le vase.

Lorsque Mr. Ren revient de la pharmacie, il me trouve me berçant tranquillement sur le petit blanc de plastique de la salle d'attente, l'air complètement fêlé, les joues tachés d'iodes et un tas de Kleenex froissés à la main. Je sens immédiatement sa présence et le suit la mine abattue vers l'escalier. Mr. Ren ne me questionne pas sur ce qui vient de se passer, se doutant probablement que c'est un de ses compères qui m'a mis dans cet état... Je retourne à mon appartement épuisée et m'effordre sur le divan au même moment où mon téléphone reçoit un message texte.

''Hi Andy, I have learned that you are very sick and I think that you might need a friend right now. Please let me know if you need anything or some company and I will come see you. I love you. Emily''.

Malheureusement, je ne pense jamais pouvoir expliquer à Emily à quel point son message a été important...  

Monday, June 6, 2011

De Jinshanling à Simatai - Pékin 3 (Prise 2)

Lors de ma première visite de la Grande Muraille, je m'étais promis d'y retourner en été alors j'ai profité de mon passage à Pékin pour en explorer une autre partie. J'ai choisi de faire la visite de Jinshanling qui permet aux visiteurs de fouler une partie intacte de la Muraille et de prendre part à une longue balade de presque 10 km jusqu'à Simatai. Aujourd'hui, la majorité des sites touristiques de la Muraille ont été retappés pour qu'elle conserve sa forme (il y a même un KFC (Kentuky Fried Chicken) sur le mur à Badaling...), alors si je voulais en voir une partie originale, je devais me rendre jusqu'à Jinshanling... mais le problème dans tout ça, c'est que Jinshanling, ce n'est pas la porte à côté!

Je me suis donc réveillée à 5h30, bien ''poquée'' d'une nuit sur un matelas défoncé de l'auberge et j'ai somnanbulé jusqu'à la réception où m'attendait le chauffeur de l'autobus. L'avantage de ce voyage organisé, c'est que le petit déjeuner est inclus alors j'ai embarqué dans l'autobus vide et attendu avec impatience d'être nourrie. Je me demandais bien quel type de boule de pain/légumes/intestins j'allais avoir droit pour déjeuner, mais qu'est-ce que j'avais tord! Quelques secondes après notre départ, la guide me tend un sac de McDonald et un café que j'aggripe avec réticence, me disant qu'elle me faisait peut-être le coup du cadeau poche qui a été emballé dans la boîte d'un meilleur produit... avant de m'exciter, je devais vérifier que c'était BIEN du McDo dans l'emballage. Malgré mon sourire fendu jusqu'aux oreilles, j'ai avalé mon McMuffin en deux bouchés et bu mon ''vrai'' café comme si c'était le dernier. Après tout, j'avais besoin d'énergie pour ma visite du mur! La guide s'adresse alors au groupe et nous annonce que 1) bonne nouvelle, nous sommes finalement en chemin vers la Muraille et il fait très beau, mais 2) mauvaise nouvelle, c'est à 3h de route du centre-ville. 3H DE ROUTE?!?! Coudonc est-ce qu'on s'en va en Mongolie? Pas de panique, j'ai mon Ipod alors je m'enfonce bien profondément dans mon siège et profite du repos.

À mi-chemin, nous arrêtons dans une station d'essence pour soulager nos McVessies et je regarde en ricanant les touristes s'approcher de la toilette. Moment d'hilarité dans 3.....2.......1

Comme de fait, deux femmes entrent dans la salle de bain et une en ressort immédiatement complètement scandalisée. Surprise! c'est deux bols (ou plutôt trous) à l'air et elle refuse de s'accroupir à côté d'une inconnue pour faire son petit pipi. Heureusement pour elle que je ne suis pas entrée en même temps parce qu'avec mes talents de Ninja de toilette, elle n'aurait même pas eu le temps de reculer en horreur que j'aurais déjà terminé de me soulager. La visite aux toilettes prend donc le double du temps parce que personne n'est assez ''freaky'' pour y aller en duo. Après les toilettes, les touristes entrent dans la station service pour acheter des cochonneries, mais je vois aussi sur leur visage que ce n'est pas exactement ce à quoi ils s'attendaient. Les Pringles à saveur de ''Korean BBQ'' ou ''Happy Spring Lime'' ce n'est juste pas pareil. Faites descendre le tout avec un ''Future Cola'' et vous êtes en business!

Trois heures de route tortueuse plus tard, nous arrivons au site qui brille par son absence de vendeurs fatigants et de touristes. Heureusement pour nous, ce n'est pas tout le monde qui est prêt à sacrifier une journée entière à Pékin pour visiter la Muraille (même si la visite de Jinshanling en vaut totalement le coup) alors il n'y a pas foule. La guide nous dirige d'un pas décidé vers le sentier et nous donne rendez-vous quelques heures plus tard pour le dîner. Complètement transportée par mon excitation, je me retrouve rapidement à la tête du groupe à jaser avec un autre touriste qui veut aussi se grouiller à monter sur le mur. Pour ce faire, nous devons escalader une petite montagne et quelques minutes plus tard, je foule de nouveau le sol d'une des merveilles du monde. Et surtout pour moi, de MA merveille du monde!

La Muraille à Jinshanling serpente au sommet de plusieurs montagnes et épouse chacune des courbes du terrain avec une exactitude militaire qui lui permet presque de se fondre dans le décor. La végétation tout en couleur du mois de mai me transporte en pensée à ma forêt canadienne et j'observe avec curiosité la construction du mur. La première moitié du trajet a visiblement été refaite: Les pierres sont plus pâles et la construction droite, mais dans la deuxième moitié du parcours, le touriste peut être témoin de la bataille que le mur livre contre la végétation. Les pierres sont à moitié détruites et plusieurs arbres ont commencés à pousser dans ses fondations. À certains endroits, le mur est tellement endommagé qu'il ne reste que le plancher des tours et il n'y a plus de murs de chaque côté du sentier... ça fait peur! Ajoutez à tout ça des pentes à 75 degré et vous serez bien content de l'avoir visité en été. 

Je commence donc ma marche de santé vers Simatai et découvre rapidement que je devrai être prudente. La poussière et la roche concassée rendent quelques endroits carrément dangereux et je fais attention de ne pas me tourner les chevilles. Après une bonne heure et demi de marche, j'arrive à la fin du trajet et rencontre de nouveau le touriste avec qui j'ai échangé quelques plaisanteries au début du trajet. Après l'avoir interrogé sur son accent qui me laisse perplexe (ce n'est pas un Anglais?! Pas un Canadien?! Ni un Américain?!), je découvre en fait qu'il vient du Sud de la France et quelques frissons de bonheur me parcourent l'échine lorsque j'entends l'accent de ma mamie française. Conclusion de cet échange pour lui: ''Oh bien ton accent québécois il est quand même bien présent!''. Haha et bien oui! Après avoir pris une deuxième centaine de photos, je décide de retracer mes pas pour aller manger. 

Avant de quitter le mur, je profite d'un moment de solitude pour me trouver un beau caillou souvenir et remercier Boudha? Dieu? (je ne suis jamais trop certaine en Chine...) de m'avoir permis de vivre une telle expérience. Jusqu'à maintenant, je dois vous avouer que c'est probablement la structure la plus impressionnante que j'ai vu dans ma vie. Les Tours Pétrona de Kuala Lumpur peuvent bien aller se rhabiller!